Backlash RSE : se cramponner à l’arbre ne retiendra ni le vent ni les vagues.

La RSE est un sport de combat : la vigueur du backlash

Dans son rapport intitulé « la RSE à la croisée des chemins », GlobeScan révèle « un point d’inflexion crucial dans l’évolution de l’agenda mondial du développement durable ». C’est l’impact de ce que l’on appelle le « backlash RSE », c’est-à-dire le mouvement de retour en arrière vis-à-vis des progrès réalisés ces dernières années et décennies en matière de RSE et de développement durable. Le vent va forcir. La RSE qui était historiquement une discipline d’endurance est en train de devenir un sport de combat.

Quand arrive avril, je suis contacté par GlobeScan, un organisme international de recherche focalisé sur les questions de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et de développement durable, qui me pose une batterie de questions sur la façon dont je perçois l’évolution des politiques de RSE/DD en France[1]. En même temps, cet organisme fait de même avec 843 autres « experts qualifiés et très expérimentés en matière de développement durable » (selon le rapport de cet organisme), en France et dans 71 autres pays. Le point de vue agrégé de ces 844 experts donne une image très globale et, me semble-t-il, très réaliste de ce qui se joue dans le monde de la RSE.

En effet, ces experts interrogés ne sont pas des perdreaux de l’année. Ils disposent tous d’une expérience d’au moins 3 ans dans le monde de la RSE et du développement durable. Les trois quarts (74 %), ont même plus de 10 ans d’expérience comme c’est mon cas ; 18 % de 5 à 10 ans et 8 % de 3 à 4 ans. Le point de vue européen est très bien pris en compte puisque 44 % de ces experts sont basés en Europe – contre 28 % en Amérique du Nord, 16 % en Asie-Pacifique, 8 % en Amérique latine ou dans les Caraïbes et 4 % dans le Moyen-Orient ou en Afrique.

Enfin, ces experts RSE ne sont pas déconnectés du monde de l’entreprise puisque 38 % travaillent en entreprise, 31 % dans les sociétés de service qui apportent leurs compétences aux entreprises (conseil RSE, notation sociale…). S’y ajoutent, de façon plus minoritaire, 10 % d’experts du monde académique et de la recherche, 9 % qui travaillent dans les organisations non gouvernementales (ONG) et 4 % dans des structures gouvernementales.

Chacun de ces experts a sans doute des contacts étroits avec quelques dizaines d’entreprises, ce qui, une fois agrégé, donne une image de la réalité de quelques dizaines de milliers d’entreprises, un tableau autrement plus réaliste que beaucoup d’articles de presse, voire d’études académiques, fondés sur quelques cas parfois anecdotiques.

Si j’ai décidé de vous parler de cette démarche cette année, c’est que le rapport 2025 de GlobeScan, réalisé avec le soutien de l’ERM Sustainability Institute et de Volans, détecte « une inflexion », qui mérite d’être partagée. Je m’appuie donc sur les conclusions de ce rapport intitulé Sustainability at a Crossroads (la RSE à la croisée des chemins)[2].

 

Quand 90% des experts pensent qu’on va dans le mur, il est temps d’agir

La RSE a mûri ces dernières années. Elle a pris de l’expansion depuis les premières publications académiques aux Etats-Unis dans les années 1950, puis a été prise en considération par les Etats et les entreprises au cours des près de quatre décennies qui ont suivi la publication en 1987 du rapport Brundtland, « Notre avenir à tous », qui a jeté les bases d’une grande partie du programme et des approches actuelles en matière de développement durable. La RSE a sans doute atteint son apogée aux alentours de 2015, qui marque à la fois l’adoption des objectifs du développement durable (ODD) des Nations Unies et la signature de l’Accord de Paris ratifié par 196 pays.

Mais comme l’explique le rapport “Sustainability at a Crossroads”, « bien que le domaine ait mûri et se soit élargi au fil des décennies, un consensus frappant s’est dégagé : l’approche actuelle n’est plus adaptée à l’objectif ». Autrement dit, « les experts RSE affirment que les pratiques actuelles ne fonctionnent tout simplement pas ». Plus de neuf experts interrogés sur dix (93%) affirment que l’ « agenda » (l’approche actuelle) doit être révisé[3]. Il faut aller plus fort et plus vite dans l’indispensable transition environnementale et sociale. Au global, plus de la moitié des experts (56%) appellent à une refonte radicale. Seuls 6% des experts considèrent que l’approche actuelle fonctionne correctement et devrait être poursuivie. « Nous sommes vraiment à la croisée des chemins en ce qui concerne la voie à suivre pour les années qui viennent », commentent les auteurs du rapport.

Jugement des experts sur l’approche de durabilité
Source : “Sustainability at a Crossroads”, op. cit

La moyenne de 56% des experts RSE qui pensent que l’on ne pourra pas faire l’économie d’une refonte radicale est géographiquement dispersée. Elle atteint 64% en Europe alors que toutes les autres zones se situent en dessous cette moyenne, y compris l’Amérique du Nord (55%) confrontée aux effets violents du trumpisme (voir : « Développement durable, croissance et emploi : pourquoi Trump se trompe ? »). C’est donc l’Europe, avant les autres continents, qui abrite les experts les plus conscients de la nécessité d’une réorientation fondamentale. Et c’est pourtant l’Union Européenne qui, sous couvert de compétitivité et de simplification, saborde méticuleusement son Pacte vert (Green deal) et abaisse ses ambitions de transition.

Par contraste, la proportion des experts RSE d’Asie-Pacifique qui prônent une refonte radicale n’est que de 45%, ce qui reflète l’ampleur des actions mises en œuvre par la Chine, qui témoigne de sa stratégie de long terme consistant à solidifier son leadership mondial par les politiques de durabilité. Ce faisant, la Chine construit ses avantages compétitifs entre le négationnisme des Etats Unis de Trump et les renoncements de l’Union Européenne.

Ce fort sentiment d’insatisfaction exprimé par les experts est le fruit de ce que l’on appelle le « backlash RSE », le « retour de bâton ». Ce terme désigne le recul qui menace les avancées récentes en matière de responsabilité sociétale des entreprises. Cette notion a été popularisée par l’essai féministe de l’Américaine Susan Faludi, « Backlash : la guerre froide contre les femmes », qui décrit le retour à des valeurs conservatrices en réaction aux avancées féministes obtenues dans les années 1970[4].

Par transposition, le « backlash RSE » fait référence à une forme de « retour de bâton » ou de contre-offensive organisée face aux progrès de la RSE, de l’ESG et du développement durable. Aux Etats-Unis, 22 lois “anti-ESG” ont été introduites en 2022, puis 49 en 2023, principalement dans les Etats Républicains les plus conservateurs, selon le comptage réalisé par le cabinet d’avocats Ropes & Gray. Pour l’essentiel, elles interdisent aux fonds d’épargne de privilégier les facteurs ESG au détriment des retours purement financiers immédiats. En Europe, le backlash se manifeste notamment par les attaques contre le Pacte vert (Green deal), législation ambitieuse adoptée par l’Union européenne à partir de 2019 et partiellement démantelée depuis 2024.

 

Le point de vue de trois femmes puissantes

Pour en savoir plus sur la nature, l’ampleur et les conséquences de ce backlash RSE, notamment en France, j’ai interrogé trois femmes puissantes[5].

Ce backlash a d’abord des conséquences tangibles dans les entreprises en matière de RH. Caroline Renoux, fondatrice de Birdeo et people4impact, explique : « Le backlash se traduit aujourd’hui par des événements très concrets : on assiste au grand retour des stagiaires en charge de la RSE pendant que des directeurs RSE bien établis jettent le manche, changent de métier ou quittent leur entreprise sans être remplacés. Notre enquête annuelle sur les salaires, qui sera publiée en octobre 2025 à l’occasion du salon Produrable, montre une légère diminution de la rémunération moyenne des postes en RSE et développement durable en 2024 : près de 4% et jusqu’à 10% dans certaines régions hors Île-de-France, ce qui constitue un retournement de tendance »[6].

Le marché du conseil est souvent un bon thermomètre de ce qui se passe dans les entreprises. A quel point les entreprises ont-elles baissé la voilure de leurs initiatives RSE ? Les difficultés du Conseil RSE aujourd’hui sont difficiles à lire, comme l’explique Agnès Rambaud, présidente de la commission RSE de Syntec Conseil : « Le marché du conseil en RSE s’est toujours caractérisé par des oscillations parfois brutales. C’est un marché cyclique. On peut se rappeler par exemple l’élan donné lors du Grenelle 1, en 2006 et 2007, suivi par le choc négatif de la crise financière en 2008, puis d’un redémarrage avec le Grenelle 2 en 2010-2011, amplifié par les effets positifs en 2015 de la COP 21 et de la mise en place des ODD (Objectifs du développement durable) des Nations Unies, puis l’impulsion donnée par la loi Pacte de 2019, suivie par l’effet récessif de la crise sanitaire, qui elle-même s’est terminée par un sursaut de dynamisme, aujourd’hui mis en cause par le backlash, par l’interprétation qui est faite du rapport Draghi et par l’Omnibus de la commission européenne »[7].

Hélène Valade, présidente de l’ORSE (Observatoire sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises), met le doigt sur les fêlures au sein de l’écosystème RSE : « Depuis plusieurs années le développement de la RSE s’appuyait sur un alignement des planètes, c’est-à-dire une cohérence de pensée et d’action entre l’opinion publique, les décideurs politiques, les responsables d’entreprise et le monde de la finance. Cet alignement se fissure aujourd’hui »[8].

Ce modèle qui articule quatre grandes parties prenantes de l’écosystème est intéressant car il reflète bien la complexité des évolutions actuelles. Si l’on prend par exemple le lien entre les deux premiers acteurs, opinion publique et décideurs politiques, voici ce qu’en dit Christian Gollier, économiste à la Toulouse School of Economics et coauteur des rapports du GIEC : « Les électeurs ont compris que la transition écologique ne sera pas heureuse parce qu’elle demandera des sacrifices à la fois financiers et de sobriété. La plupart ne sont pas prêts à y consentir. Les politiciens, même écologistes, l’ont compris et préfèrent parler d’autres choses »[9].

Les reculs actuels ne doivent pas masquer les acquis : « Malgré ce caractère cyclique je crois qu’on a réussi à ancrer des progrès à la fois dans les territoires et dans les entreprises. On a réussi à cranter des évolutions sur lesquelles il n’y aura pas de retour en arrière. Les citoyens ont passé un cap, » ajoute Agnès Rambaud.

 

L’attentisme un brin complaisant des entreprises

Un autre point d’alerte souligné par le rapport “Sustainability at a Crossroads” est la relative complaisance des entreprises : les experts d’entreprise (en général des directeurs généraux et des directeurs de la RSE/DD) sont les seuls à être plus nombreux à prôner des « changements modestes » (48%) qu’une « refonte radicale » (45%). A l’opposé, les experts qui appellent le plus à une refonte radicale sont extérieurs à l’entreprise, ce qui favorise un point de vue plus critique : ceux des ONG (71%), les académiques et chercheurs (67%), les prestataires de services aux entreprises (58%) et étonnamment, les experts gouvernementaux (56%). Cette mansuétude des entreprises vis-à-vis des approches actuelles est inquiétante puisque ce sont elles qui détiennent la majorité des leviers d’action, notamment vis-à-vis de la lutte contre le changement climatique (voir : « Pour une éthique du dirigeant : l’entreprise comme problème ET comme solution »).

La moitié (50%) des professionnels du développement durable attribuent une note « faible » (« poor ») aux progrès réalisés dans la transition mondiale vers le développement durable ces dernières années. 44 % sont neutres quant aux progrès réalisés, tandis que 5% seulement se hasardent à soutenir que les progrès ont été excellents. Là encore, ce sont les experts d’entreprise qui sont les moins critiques, avec 45% de notes faibles. Les experts RSE basés en Europe, ainsi que les experts des secteurs universitaires, de la recherche et des ONG ont les points de vue les plus critiques sur les progrès mondiaux en matière de développement durable réalisés à ce jour.

 

Une perte de confiance généralisée : l’écosystème RSE se fissure

Cette insatisfaction profonde repose en particulier sur une perte de confiance vis-à-vis des organisations et institutions qui n’ont pas réussi à insuffler les changements nécessaires à l’atteinte des objectifs de durabilité. « Les experts RSE expriment une perte de confiance dans les organisations de la société civile, y compris les organisations non gouvernementales, les mouvements sociaux, les Nations Unies et les partenariats multisectoriels, et une faible confiance dans l’efficacité des cadres mondiaux tels que les ODD (objectifs de développement durable) et l’Accord de Paris », nous dit le rapport “Sustainability at a Crossroads”.

Alors que la perception de la contribution du gouvernement, du secteur privé et de la société civile au développement durable a diminué, les institutions universitaires et de recherche sont les seules à gagner en crédibilité, se démarquant comme des sources fiables d’innovation et d’impact. Ceci confirme que les experts RSE ont bien compris qu’il est essentiel de préserver les acquis de la science et la crédibilité des scientifiques. Mais il est bien évident que ce n’est pas suffisant pour inverser la tendance…

Comme l’enquête est réalisée depuis 2012, on peut examiner l’évolution sur longue période, comme le propose ce schéma qui présente l’évolution de la proportion des experts RSE qui notent comme excellente la performance de chaque organisation en termes de contribution au développement durable depuis le Sommet de la Terre en 1992 à Rio :

Evaluation de la performance de chaque organisation en termes de contribution au développement durable depuis
le Sommet de la Terre en 1992 à Rio. Source : “Sustainability at a Crossroads”, op. cit

On comprend ici l’alerte des auteurs du rapport sur le « point d’inflexion » : l’évaluation de la performance par les experts RSE décroche pour toutes les organisations, à l’exception des institutions universitaires et de recherche. On retrouve ici la matérialisation du point de vue d’Hélène Valade mentionné ci-dessus : l’alignement au sein de l’écosystème RSE se fissure. On remarque le score pitoyable alloué aux gouvernements : seuls 5% des experts leur accordent une performance positive en termes de contribution au développement durable. Malgré les progrès obtenus en matière de Finance durable, le taux de confiance accordé aux investisseurs institutionnels (12%) et aux institutions financières internationales (19%) est également très faible.

 

La responsabilité des entreprises : persister plutôt que de laisser aller

Quant aux entreprises privées, seuls 14% des experts pensent que leur performance est excellente. Ce score a chuté à son plus bas niveau depuis le début du suivi en 2012. Mais le point le plus intéressant, qui n’est pourtant pas relevé par les auteurs, c’est que le décrochage des entreprises privées intervient dès 2017-2018, avant celui des autres organisations. 2017, c’est le début du premier mandat de Donald Trump (qui se déroule de 20 janvier 2017 au 20 janvier 2021), qui commence par l’annonce du retrait de son pays de l’Accord de Paris en juin et se poursuit par une suite de décisions qui ont eu un impact considérable sur le développement durable à l’échelle mondiale, dont la suppression de plus de 100 réglementations environnementales, envoyant un signal aux autres pays pour assouplir leurs propres engagements.

L’année suivante le rapport du GIEC de 2018 sur un monde à +1,5°C a tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences dramatiques du réchauffement climatique, appelant à une transformation urgente des modèles économiques. Ce rapport commençait à instiller l’idée que la fenêtre de réaction était déjà en train de se fermer. C’est aussi la multiplication des tensions sociales, dont le mouvement des Gilets jaunes en France, qui a débuté le 17 novembre 2018 et a été le révélateur du décalage entre les politiques écologiques et les attentes citoyennes, notamment autour de la taxe carbone. C’est ensuite le début d’une longue série de COP qui ne parviennent pas à inverser le cours des choses, avec l’échec de la COP25 à Madrid, qui se termine fin 2019 sur un bilan très décevant.

Cette analyse suggère que le backlash en entreprise vient de loin, alors que d’autres analyses se réfèrent plutôt à un déclenchement plus récent, consécutif à la reprise de la guerre menée par la Russie en Ukraine en 2022, à la crise européenne de l’agriculture en 2023, au retournement de la Commission européenne à la suite des élections européennes de l’été 2024 et au retour au pouvoir de Donald Trump (janvier 2025).

C’est plutôt sur cette seconde hypothèse que s’arrête l’enquête du magazine Socialter : « Tout semblait bien parti avec le Pacte vert initié en décembre 2019. C’est avec le Covid et surtout à partir de l’invasion de l’Ukraine en 2022 que les industriels ont commencé à demander les dérogations aux normes environnementales. Le Cooa-Cogeca, syndicat agricole européen auquel est affiliée la FNSEA française, produit un communiqué sur la sécurité alimentaire en Europe axé sur le risque des normes environnementales pour la croissance de la production. Le narratif commençait à se renverser »[10].

A la même époque, en France, comme chaque année, le président de la République présentait ses traditionnels vœux aux Françaises et aux Français, le 31 décembre 2022. Mais en revenant sur l’année écoulée, Emmanuel Macron s’est attiré les foudres des défenseurs de l’environnement avec une phrase plus que maladroite. « Je repense aux vœux que je vous présentais à la même heure il y a un an (…). Qui aurait pu prédire (…) la crise climatique aux effets spectaculaires encore cet été dans notre pays ? », s’est notamment demandé le chef de l’État, évoquant alors « d’inimaginables défis » à surmonter après la pandémie, de la guerre en Ukraine à la crise énergétique, en passant par le retour de la menace nucléaire. Qui aurait pu prédire la crise climatique, en effet… « En une phrase, le Président de la République a montré tout le chemin qui reste à parcourir pour ancrer dans notre système de pensée et d’action les données que nous détenons depuis désormais des décennies sur le changement climatique », écrit Béatrice Héraud dans sa lettre du 12 janvier suivant[11].

Quelques mois plus tard, le 11 mai 2023, Emmanuel Macron appelait à « une pause réglementaire européenne » en matière de contraintes environnementales, estimant que l’Union avait fait « plus que tous les voisins » et qu’elle avait désormais « besoin de stabilité » pour son industrie. « On est devant, en termes réglementaires, les Américains, les Chinois ou toute autre puissance au monde », a ainsi estimé le président de la République lors d’un discours à l’Élysée sur la réindustrialisation de la France. Pour lui, « il ne faut pas qu’on fasse de nouveaux changements de règles, parce qu’on va perdre tous les acteurs », et faire peser des « risques » sur les « financements » de projets. Cette frayeur « d’être devant » sonnait l’installation officielle du backlash RSE en France.

C’est également en faveur de cette seconde hypothèse que plaide le rapport « CEO’s Guide to Sustainability » du cabinet de stratégie Bain, qui a adopté une méthodologie intéressante, basée sur l’utilisation de l’intelligence artificielle[12]. Bain a mis en machine les 35.000 prises de parole publiques de CEO (directeurs généraux) de 150 grandes entreprises entre 2018 et 2024, et a réalisé des analyses sémantiques grâce à l’outil Sustainability Pulse. Cette approche permet de dépasser les impressions médiatiques pour mettre en évidence les tendances réelles de la gouvernance climat et des stratégies de durabilité.

La RSE dans les priorités des DG de grandes entreprises
Source : Bain & Co, 2025

La tendance est nette : la RSE qui ne cessait de s’affermir dans les priorités des CEO des grandes entreprises dans le monde s’effondre brutalement à partir de 2023, même si on observe un léger rebond en 2025.

Ceci confirme la complexité d’un phénomène socio-politique comme le backlash. Caroline Renoux insiste sur son caractère multifactoriel : « Le backlash n’est pas le résultat d’un phénomène unique mais plutôt de plusieurs évolutions qui se combinent. Il y a d’abord un courant qui vient des États-Unis, quelques années avant le retour de Trump au pouvoir, qui mélange allègrement l’engagement environnemental et le wokisme. Il y a aussi à partir des élections européennes de l’été 2024, les initiatives de la Commission européenne, qui réduit ses ambitions, à contre-courant de ce qu’elle avait porté avec le Pacte vert dans la précédente mandature. Il y a aussi le contrecoup de la CSRD, qui s’est trouvée prise dans le ras-le-bol du ‘trop de réglementation’ et a provoqué des questionnements sur la direction à prendre pour inscrire le développement durable dans la pratique des entreprises ».

Dans ce contexte, la responsabilité des entreprises est claire : choisir, contre vents et marées, de persister, de poursuivre la mise en œuvre des initiatives de RSE, tout en restant attentives à ce que nous dit ce mouvement de ressac. Il est clair, par exemple, que nous n’avons pas toujours été suffisamment rigoureux dans la conduite du changement vis-à-vis de nos parties prenantes (cf. les Gilets jaunes face à la taxe carbone) et dans la démonstration des apports de la RSE pour l’ensemble d’entre elles.

Contrairement au mot galvaudé dont on se gargarise beaucoup en cette période de doutes, il ne s’agit pas de résilience. La résilience, un mot qui vient de la physique, a un sens précis : c’est la capacité d’un corps à revenir à son état initial après avoir subi un choc. Après le backlash, il n’y aura pas de retour à une situation précédente. C’est à nous de saisir ces objections, ces réticences, ces conservatismes et de parvenir à les accommoder avec nos initiatives RSE pour ouvrir la page suivante.

 

L’ampleur du backlash : le vent et les vagues

Depuis l’édition 2024 de “Sustainability at a Crossroads”, les experts RSE sont interrogés sur l’existence ou l’ampleur du backlash contre la RSE (incluant l’ESG) dans leur pays. En 2024, 57% d’entre eux disaient qu’il existe bien un backlash et qu’il est significatif. En 2025, cette proportion est passée à 70%, soit une augmentation de 13 points de pourcentage en un an. Le « point d’inflexion crucial » relevé par le rapport se situe aussi dans la soudaineté de cette augmentation.

En vous souhaitant mes vœux à l’ouverture de cette année 2025, je relevais ce point d’inflexion : pour la première fois depuis les débuts de l’histoire de la RSE dans les années 1950, nous naviguons par vent debout (voir : « Vœux 2025 : We are still in ! »). Il va falloir se réinventer…

Là encore, les experts RSE en entreprise sont les moins nombreux – mais tout de même 66% – à partager ce jugement sur le caractère significatif du backslash, contre 83% du monde académique et de la recherche. L’ampleur du backlash n’est pas homogène à l’échelle mondiale et reflète la propagation d’un mouvement né aux Etats-Unis. Ainsi 91% des experts RSE nord-américains jugent que ce backlash est significatif dans leur pays. C’est aussi le cas de 71% de leurs collègues européens. A l’inverse, 61 % des experts RSE basés en Asie-Pacifique affirment qu’il n’y a pas de backlash significatif dans leur région : la durabilité y est perçue comme un moteur de compétitivité et non comme un frein. Cette croyance est en effet une caractéristique culturelle essentielle du backlash, qui a réussi à instiller l’idée que durabilité et compétitivité s’opposeraient.

En France, le backlash provoque des dégâts sociaux dont on parle peu, comme le souligne Caroline Renoux : « La thématique RSE conservant une certaine aura auprès du grand public, il y a de plus en plus de cadres qui cherchent un poste dans ce domaine, alors que le nombre d’embauches diminue sous l’effet du backlash ». Sur un plan qualitatif, la vigueur du backlash réhabilite une qualité essentielle à la RSE : le discernement (voir : « Le discernement, une compétence clé pour la RSE »).

Il faut cependant préciser que même aux plus belles heures de la RSE, il y a toujours eu des vents contraires. En voici trois exemples concrets, qui se déroulent dans la période glorieuse du début des années 2020.

Nicolas Namias a fait la déclaration suivante à l’occasion de sa prise de fonction de directeur général de Natixis en août 2020 : « Ma position est claire. Mon mandat en tant que directeur général de Natixis consiste simplement à créer de la valeur pour tous mes actionnaires, pour chacun d’entre eux. C’est mon unique mandat »[13]. Un an après la promulgation de la loi Pacte, il fallait oser ! Et nous ne sommes pas chez un fou-furieux du libéralisme débridé. Nous sommes chez Natixis, filiale du groupe BPCE, constitué, rappelons-le, du rapprochement des Caisses d’Epargne et des Banques Populaires, qui se vivent toutes deux comme acteurs de l’Economie sociale et solidaire (ESS).

L’essayiste Erwan Le Noan a publié une tribune dans Le Point (5 août 2022) intitulée « RSE : la véritable responsabilité sociale des entreprises » pour expliquer que « le rôle clé d’une entreprise est d’accroître ses profits, pas de peaufiner sa politique RSE ». Oui, en 2022, on peut réécrire le célèbre article écrit cinquante ans auparavant par l’économiste Milton Friedman, prétendant que « la seule responsabilité sociale du chef d’entreprise est de maximiser les profits »[14].

Alexandre Bompard, PDG du groupe Carrefour, a participé à un débat intitulé « Les entreprises à mission, moteur d’un nouveau capitalisme » lors des Rencontres économiques d’Aix-en-Provence le 9 juillet 2022. A rebours des autres participants – Jean-Dominique Senard (président de Renault), Bris Rocher (PDG du groupe Rocher), Pascal Demurger (directeur général de la Maif) – il explique : « Je rêverais de me lever tous les matins en me disant que je vais sauver la planète. Mais ce n’est pas mon rôle. Ma vocation : c’est de créer de la valeur »[15]. De la valeur, certes, mais pour qui ? Malgré la loi Pacte, malgré le (relatif mais significatif) succès de la Raison d’être et de la Société à mission, ce débat sur la finalité de l’entreprise n’est pas clos et la confusion règne entre « créer de la valeur » versus « créer de la valeur globale » (ce concept créé par le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD) en 2002 a quand même plus de 20 ans…).

 

L’engagement des entreprises change de nature

L’une des traductions concrètes du backlash en France est le changement de nature de l’engagement des entreprises.

Selon Agnès Rambaud, « Sur la période récente, les entreprises se recentrent sur des démarches très opérationnelles : les analyses de cycle de vie, les plans de décarbonation, l’efficacité énergétique, les diagnostics de vulnérabilité. Paradoxalement, si des mobilisations d’ampleur contre l’ESG en général et la CSRD et CS3D en particulier se sont exprimées récemment, si les résistances aux changements sont si importantes, c’est justement parce que ces enjeux sont devenus incontournables. Dans l’entreprise, une majorité de salariés a compris qu’on ne peut plus faire l’impasse sur les sujets RSE. La parole des scientifiques est de plus en plus entendue. Dans l’opinion publique, les nouveaux rendez-vous réguliers comme le journal télévisé climat du soir ancrent la nouvelle réalité dans les esprits ».

Agnès a raison d’insister sur ce paradoxe. Car comme on l’a vu plus haut, la notion de backlash a été créée par des universitaires dans le courant du féminisme pour désigner le retour à des valeurs conservatrices. Mais ce retour s’est construit en réaction aux avancées féministes obtenues dans les années 1970. On ne peut pas comprendre le backlash si on ne s’arrête pas un instant sur sa dynamique : le mouvement de réaction trouve son énergie dans le progrès qui l’a précédé. C’est aussi la thèse dite du « backlash culturel », théorisée en 2016 par deux politologues américains, Pippa Norris et Ronald Inglehart.

Ces deux chercheurs, qui voulaient comprendre les raisons de la montée du populisme d’extrême droite aux Etats-Unis et dans les grandes démocraties occidentales à la suite de la première élection de Donald Trump, affirment que c’est la progression rapide du libéralisme culturel dans les trois décennies précédentes qui a engendré, en retour, une tentation contre-révolutionnaire de la part des électorats les plus conservateurs et les plus fragiles, qui voient les repères de leurs certitudes culturelles vaciller[16]. L’ultra-conservatisme s’érige à rebours des grandes avancées culturelles et sociétales, comme le ressac se nourrit du déferlement de la vague.

De la même façon, la montée de l’antisémitisme et du repli identitaire est bien réelle alors même que de nombreux travaux scientifiques, à commencer par ceux du politiste Vincent Tiberj, sont venus démontrer la forte progression de la tolérance dans l’opinion publique sur les questions de mœurs depuis plusieurs décennies : recul de l’homophobie, du machisme, du validisme, voire du racisme et du rejet de la différence culturelle, qui font de la France d’aujourd’hui une société plus tolérante et inclusive qu’elle ne l’a jamais été[17].

Le backlash RSE doit s’analyser comme un mouvement de réaction vis-à-vis des progrès réalisés par la RSE depuis les années 1990. Ces acquis ne sont pas tous balayés ; ils constituent des points d’appui solides. Même si le backlash est violent, il ne nous empêchera pas de trouver les antidotes…

Hélène Valade confirme les changements à l’œuvre : « On assiste d’abord à des retours en arrière des réglementations, que ce soit dans le monde, en Europe ou en France, mais les entreprises maintiennent le cap. Certes, les entreprises avec lesquelles je travaille, c’est-à-dire les adhérentes de l’ORSE, sont les plus engagées et par conséquent ne sont pas forcément représentatives de l’ensemble du tissu productif français. Cependant, autant que je puisse en juger, l’engagement des entreprises vis-à-vis des grands enjeux de la RSE se maintient dans l’ensemble. Il change de forme car nous sommes en train de passer d’une approche d’engagement par le corporate, constituée de beaucoup d’effets d’annonce et de déclarations globales, parfois un peu déconnectées de la vie quotidienne de l’entreprise, à une approche beaucoup plus opérationnelle, basée sur des objectifs concrets et assortis d’indicateurs de pilotage. Cette approche est beaucoup plus discrète, mais elle est davantage appuyée par des preuves ».

Moins de diseurs et plus de faiseurs, c’est un peu ce que j’appelle de mes vœux dans ce blog depuis longtemps (voir : « Les leviers de la RSE : l’heure des grands faiseurs est venue »).

 

Que faire pour accélérer ?

Afin de tracer une voie concrète pour le programme de RSE sur la période 2025-2030, les auteurs du rapport “Sustainability at a Crossroads” ont fait évaluer par les experts RSE un ensemble de 64 actions, interventions ou initiatives potentielles. Celles-ci ont été évaluées et organisées dans une matrice en fonction de deux critères, leur faisabilité et leur impact potentiel, ce qui a permis d’identifier les voies les plus prometteuses en vue d’obtenir des progrès significatifs[18].

Ces actions couvrent quatre catégories clés d’agents de changement, qui recouvrent les quatre grands acteurs de l’écosystème RSE évoqués ci-dessus :

  • Actions de la société civile – englobant les ONG, les mouvements populaires, les associations, les universitaires, les médias et les consommateurs.
  • Actions gouvernementales et de politiques publiques – impliquant les décideurs politiques, les législateurs et les institutions multilatérales.
  • Actions des entreprises – axées sur les entreprises du secteur privé, les chaînes d’approvisionnement et les initiatives menées à l’initiative des branches ou des secteurs d’activité.
  • Actions des investisseurs et des marchés de capitaux – ciblant les investisseurs, les gestionnaires d’actifs, les banques, les assureurs et les régulateurs financiers.

Actions des entreprises : matrice Impact & Faisabilité
Source : “Sustainability at a Crossroads”, op. cit

Les experts RSE identifient une gamme d’actions à fort impact et à forte faisabilité qui pourraient provoquer un élan dans tous les secteurs. Dans la catégorie des actions des entreprises, 6 actions sont jugées comme à la fois à plus fort impact et les plus faisables (quadrant nord-est de la matrice) : la mieux placée est l’innovation ou R&D pour des solutions de durabilité. Cela reflète peut-être le « technosolutionnisme », la confiance excessive qui fait prendre le risque de l’attentisme en attendant que la technologie résolve tous les problèmes. Cependant, d’autres solutions technologiques plus précises comme les technologies de capture du carbone ou de géo-engineering sont, elles, très mal classées (peu d’impact et faible faisabilité).

Viennent ensuite cinq actions beaucoup plus consensuelles : la diffusion de la durabilité par les ventes de produits et de services ; les actions sur la chaîne de valeur ; la mise en œuvre des pratiques d’économie circulaire ; les collaborations multi-sectorielles et la conformité avec les réglementations sur le reporting de durabilité. Cette dernière action montre que la réglementation européenne CSRD n’est pas majoritairement perçue comme le fardeau administratif que certains prétendent (voir : « Mise en œuvre de la CSRD : la vérité des coûts »).

A l’opposé, les 4 actions jugées les moins désirables (quadrant sud-ouest) sont la capture du carbone et le géo-engineering, comme mentionné ci-dessus, mais également l’adhésion aux principes de Global Compact et la certification B-Corp.

En finance, des mécanismes tels que les obligations vertes, l’investissement et l’intégration des facteurs ESG sont considérés comme des leviers clés de changement. Les mesures politiques gouvernementales telles que la tarification du carbone et le reporting obligatoire sont également citées pour leur potentiel à produire des résultats tangibles[19].

A mon grand regret des actions qui me sont chères n’apparaissent pas dans ce paysage foisonnant : rien sur la reconception et l’hybridation des modèle d’affaires, rien sur la gouvernance, sur l’éthique, ni sur le management responsable.

Caroline Renoux insiste sur l’envers du décor : « Malgré le backlash, je constate des évolutions positives : la problématique de décarbonation reste dans les priorités des entreprises ; la biodiversité, longtemps restée dans l’angle mort, est un sujet qui continue à monter ; les entreprises s’intéressent beaucoup plus à la ressource en eau et à sa préservation ; enfin et surtout, les enjeux de durabilité restent fortement présents au plus haut niveau de la gouvernance des entreprises, dans les conseils d’administration et les Comex ».

Hélène Valade mise, elle aussi, sur une RSE plus positive, moins technique et plus en phase avec les attentes : « Pour l’avenir, je pense que nous avons très largement intérêt à revenir sur le lien entre RSE, gestion des risques et création d’opportunités. C’est le moyen de sortir du piège de ‘l’écologie punitive’ et de montrer concrètement aux entreprises où est leur intérêt. L’opposition entre RSE et compétitivité, couramment maniée par les forces politiques qui voudraient revenir en arrière, n’est pas un argument relayé au sein des entreprises. Nous avons aussi intérêt à changer notre posture, qui s’est révélée trop technique et trop focalisée sur le climat dans le passé. Agir sur l’eau, sur la biodiversité, c’est possible, ça marche et cela donne envie de continuer à se mobiliser ! Il faut évoluer vers une approche plus orientée vers les enjeux concrets de l’entreprise, vers le caractère systémique de la RSE et vers les problématiques qui englobent les préoccupations des salariés et des citoyens ».

 

Conclusion (provisoire)

Au terme de cet article, notre perception des conséquences du backlash est-elle clarifiée ? Pour ma part, je réponds par la négative ! La question clé est de savoir avec un bon niveau de certitude si le backlash se traduit seulement par une érosion du discours RSE des dirigeants des entreprises – comme en témoigne par exemple la courbe du cabinet Bain commentée ci-dessus, qui a suivi les déclarations des CEO – ou si ce backlash se traduit également par un affaissement des initiatives RSE et des projets menés par les entreprises, ce qui aurait bien plus de conséquences négatives. Pour le savoir, il faudra se livrer à l’exercice fastidieux d’éplucher les enquêtes, les baromètres et les études publiées sur le sujet. Cela prendra quelques semaines, mais cela sera publié sur ce blog ! Stay tuned, comme on dit en bon français…

Une certitude à ce stade : les chocs géopolitiques, politiques et économiques constitutifs du backlash représentent des menaces mais aussi, évidemment, des opportunités.

Tout d’abord, le backlash devrait se traduire par une plus grande cohésion des acteurs de la RSE, entreprises, conseils, auditeurs, investisseurs à impact… Comme je l’ai montré avec mon collègue Michel Laviale, l’adversité devrait pousser à serrer les rangs et adopter des stratégies de convergence (voir : « Régénérer la RSE ! »).

Pour Agnès Rambaud, « L’adversité devrait conduire tous les acteurs de la RSE à se serrer les coudes et c’est pourquoi je me félicite de l’initiative AIR, l’Alliance Inter-Réseaux, scellée en juin 2025, qui rassemble plusieurs réseaux d’entreprises engagées : le Centre des Jeunes Dirigeants, la Convention des Entreprises pour le Climat, B-Lab, la Communauté des Entreprises à Mission, MakeSense, le Shift Project, le Mouvement Impact France, le Collectif Dirigeants Responsables et d’autres collectifs. Sans oublier des collectifs que tu apprécies moins, comme le Regen écosystème ou GenAct. L’objectif de cette alliance est de favoriser la connaissance mutuelle entre ses membres, le partage d’expertises et la convergence des stratégies et du plaidoyer, afin de contribuer à la vitalité de ces communautés. On observe la même évolution au niveau européen avec la création d’un collectif très dynamique, #WeAreEurope, qui ne se résigne pas à l’affaissement des valeurs européennes et construit des alternatives concrètes aux attaques contre le reporting de durabilité ».

Les acteurs de la RSE doivent maintenant construire leur stratégie pour tirer leur épingle de ce jeu. Comme au judo, ils doivent utiliser la vigueur du backlash pour retourner ses intentions. Ils vont avoir fort à faire pour solidifier les liens entre parties prenantes, pour construire des partenariats consistants afin de reconstruire les convergences entre entreprises, salariés, acteurs de la chaîne de valeur amont et aval, investisseurs et monde de la recherche. Ils doivent faire fi des incertitudes (politiques, économiques…) et foncer, pivoter, provoquer les ajustements nécessaires pour assurer une transition positive pour le vivant, c’est-à-dire juste pour la société et sobre pour la nature.

En d’autres termes, comme le disait tout récemment un haut cadre bancaire : « Le véritable défi réside dans la capacité à rendre la RSE concrète, accessible et pleinement opérationnelle dans le quotidien des entreprises. En d’autres termes, en faire un levier stratégique qui alimente directement la performance commerciale de l’entreprise à but lucratif ».

Il faudra pour cela créer de nouveaux marchés, qui renforceront les sociétés et les économies, tout en augmentant la capacité des entreprises à s’adapter et à absorber les chocs. Il faudra enfin, et c’est d’autant plus nécessaire compte tenu de la vigueur du backlash, développer des opportunités qui créent de la valeur business tout en répondant aux impératifs de durabilité.

Martin RICHER, consultant en Responsabilité sociale des entreprises, fondateur de
Management & RSE

 

Pour aller plus loin :

Accédez au rapport : “Sustainability at a Crossroads”, ERM, GlobeScan and Volans report, July 2025

Consultez les autres articles de ce blog sur l’approche stratégique de la RSE

Crédit image : Dans les environs de New York, en août 1954, un passant se retient à un arbre pour éviter d’être emporté par l’ouragan Carole, qui provoque de fortes vagues.

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[1] Conformément aux travaux des Nations Unies, nous considérons que les notions de RSE et de Développement durable, historiquement distinctes, ont fortement convergé au point de presque se confondre. Dans ce document, nous utilisons le terme de RSE, sachant que « La responsabilité sociétale des entreprises correspond à la prise en compte dans l’entreprise des enjeux du développement durable » (Pacte Mondial des Nations Unies).

[2] “Sustainability at a Crossroads”, ERM, GlobeScan and Volans report, July 2025. Enquête « menée auprès de 844 experts qualifiés et très expérimentés en matière de RSE et développement durable » dans 72 pays. Données recueillies entre le 22 avril et le 26 mai 2025.

[3] En anglais, l’ « agenda » signifie l’ordre du jour, le plan, le programme, l’approche actuelle.

[4] Editions Crown, 1991 ; version française : éditions des femmes, 1993

[5] « On dit des femmes qu’elles sont belles, charmantes, piquantes, délicieuses, intelligentes, vives, parfois dures, manipulatrices ou méchantes. « Hystériques’ lorsqu’elles sont en colère. « Arrivistes’ lorsqu’elles réussissent. Mais on dit rarement d’elles qu’elles sont puissantes. (…) [On mentionne moins] leur force intérieure et leur influence dans la société, en un mot, leur puissance. » – 4ème de couverture de « Femmes puissantes » de Léa Salamé, éditions Les Arènes, septembre 2020.

[6] Entretien avec Caroline Renoux, fondatrice de Birdeo et people4impact, 23 septembre 2025. Les autres citations de C. Renoux dans cet article proviennent de la même source.

[7] Entretien avec Agnès Rambaud, présidente de la commission RSE de Syntec Conseil, 26 septembre 2025. Les autres citations d’A. Rambaud dans cet article proviennent de la même source.

[8] Entretien avec Hélène Valade, présidente de l’ORSE (Observatoire sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises), 26 septembre 2025. Les autres citations d’H. Valade dans cet article proviennent de la même source.

[9] Entretien avec Christian Gollier, Le Figaro, 4 octobre 2025. C Gollier est l’auteur de « Economie de l'(in)action climatique », PUF, septembre 2025

[10] « À Bruxelles, s’organise le backlash du siècle », Socialter, 14 juin 2025, p. 40

[11] Béatrice Héraud, « Lettre de Youmatter », 12 janvier 2023

[12] “The Visionary CEO’s Guide to Sustainability 2025 ; The Power of Pragmatism”, Bain & Co. Report, September 2025

[13] Challenges et Reuters, 4 août 2020

[14] Milton Friedman, « The Social Responsibility of Business Is to Increase Its Profits », New York Times Magazine, september 13, 1970, p. 173–178

[15] « Le discours détonnant d’Alexandre Bompard, PDG de Carrefour, sur les entreprises à mission », Ouest-France, 10 juillet 2022 https://larochesuryon.maville.com/actu/actudet_-le-discours-detonnant-d-alexandre-bompard-pdg-de-carrefour-sur-les-entreprises-a-mission-_54135-5324117_actu.Htm

[16] « Guerre culturelle : malgré l’obscurantisme de l’extrême droite, la France demeure éclairée », Libération, 9 octobre 2025, page 3

[17] Voir Vincent Tiberj, « La Droitisation française : mythe et réalités », Paris, Presses universitaires de France, 2024

[18] Les deux questions posées sont : 1) Veuillez évaluer dans quelle mesure chacun des éléments suivants pourrait potentiellement conduire à des résultats positifs significatifs en matière de durabilité au cours des cinq prochaines années. 2) Veuillez évaluer dans quelle mesure il est probable que nous puissions mettre en œuvre à grande échelle chacun des éléments suivants au cours des cinq prochaines années, en tenant compte de la volonté politique, des coûts économiques, de l’acceptation sociale et de la maturité technique.

[19] Pour davantage de détails, se référer aux tableaux figurant à la fin du rapport.

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